jeudi 1 octobre 2009


Le livre J’ai fait HEC et je m’en excuse est incontestablement la version française de What They Teach You at Harvard Business School: My Two Years Inside the Cauldron of Capitalism, livre écrit par Philip Delves Broughton (également auteur de nombreux articles tels que Harvard's Masters of the Apocalypse, paru dans le Sunday Times). Le livre de Florence Noiville surfe donc sur la vague de remise en question mondiale de la formation des élites, vague qui a bien évidemment trouvé son origine dans la crise.

Derrière ce titre provocateur et racoleur, Florence Noiville cristallise une critique de l’école HEC et de ses diplômés. Elle regrette l’approche court-termiste sans cesse mise en avant dans l’enseignement d’HEC et par extension dans toutes les ESC. Elle déplore également le fait que la plupart des étudiants soient guidés et motivés par la quête de l’argent facile et ce sans remettre en question les tâches effectuées ni les finalités des objectifs accomplis.

Elle rejoint donc la critique que Delves Broughton fait de la Harvard Business School (HBS), qui souligne l’arrogance des jeunes étudiants de MBA à HBS. Dans un entretien face à 80 étudiants de MBA et Jeanette Purcell, chief executive de l’association AMBA, Delves Broughton avait résumé sa théorie en quelques points.
  • Selon lui, les études de cas, sur lesquels travaillent les étudiants de HBS sont beaucoup trop simplistes et ne correspondent pas à la réalité face à laquelle les étudiants se retrouvent confrontés dans leurs vies professionnelles. Il préconise ainsi des études de cas beaucoup plus transversales dans lesquels on retrouverait des problématiques de finance mais également des problématiques de RH ou de marketing, comme dans la vie en entreprise. Cette approche est vraiment pertinente, néanmoins rend plus ardu le travail des concepteurs de cas pratiques.
  • Le second point évoqué correspond à la gestion du réseau. Selon lui, il est très dommageable pour une entreprise de recruter de nombreuses personnes d’une même école car cela ne crée pas de synergies. Les personnes recrutées sont toutes semblables, proviennent du même moule et usent les mêmes cadres de réflexions lorsqu’elles conduisent leurs travaux. Ce point est en revanche beaucoup plus contestable.
  • Enfin, Delves Broughton souligne que le fait de retrouver à la tête des grandes entreprises et au sein de l’Etat même des anciens de HBS est dangereux pour notre économie mondialisée. Selon lui, la « secte HBS » est présente partout et guide les politiques économiques des USA. Le meilleur exemple : le sauvetage de la banque AIG par Paulson (ex HBS, ex Goldman Sachs et aujourd’hui secretaire aux Trésor) dont les dettes à l'égard de Goldman Sachs s'élevaient à 12 milliards de dollars. Quelques semaines plus tôt le Trésor américain laissait couler sans sourciller Lehman Brothers. (voir http://www.lepoint.fr/actualites-economie/2009-09-24/goldman-sachs-ne-perd-jamais/916/0/379933)

Ces accointances nuisent à notre capitalisme contemporain et favorisent la reproduction du modèle qui a conduit à notre crise.

De la difficulté de changer les moeurs

La critique majeure que l’on pourrait faire à ces deux auteurs est que leurs dénonciations émergent uniquement après que la crise ait été subie et constatée. Où étaient-ils il y a 5 ans quand les augmentations de salaire des cadres supérieurs frôlaient les 25% de moyenne et lorsque les élites s’ennorgueuillaient de la stabilité du système financier. Il est bon de savoir remettre en question le système du dressage des élites et apporter de nouvelles idées afin de l’améliorer.
Néanmoins, on peut nuancer ce bilan alarmiste et constater dans nos écoles de commerce que la tendance a été pressentie il y a quelques années en proposant notamment des spécialisations dans le domaine de la culture, du développement durable ou encore des cours de sciences humaines. Les écoles prennent conscience que ce modèle n’est pas viable et qu’il convient de développer des modes de pensée alternatifs.








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